Ces derniers jours, je me suis demandée pourquoi je cherchais toujours, en tant qu’illustratrice et autrice, à m’éloigner de la représentation photographique du réel. Et pourquoi j’étais tant attachée au genre fantastique. Contrairement à ce qu’on pourrait croire, je pense que c’est justement une question de fidélité.
On oppose souvent le réel à la fiction, à la chimère, à l’illusion, au rêve. À tout ce qui n’est pas palpable, “concret”. Ou visible. Or beaucoup de choses invisibles, ou qui d’une certaine manière nous échappent, sont pourtant bien présentes dans notre quotidien. L’intuition par exemple. Ou encore notre état mental et émotionnel.
En donnant corps à l’invisible, le fantastique permet de partager une réalité commune souvent difficile à décrire.
En se nourrissant de l’émotionnel, du sensoriel et en convoquant des symboles mémorables (objets, lumières, couleurs, etc.), le fantastique agit en miroir grossissant.
À la subjectivité s’ajoute l’intensité : le fantastique facilite la projection et rend captif.ves.
Ce genre se caractérise par l’irruption de l’étrange, de l’irrationnel, de l’anormal, dans une situation à priori réelle, familière. Il sème le doute, brouille le “sentiment de réalité” depuis l’intérieur.
Au-delà de refléter l’imprévisibilité, le fantastique nous confronte à l’altérité. Il vient remettre en cause ce sur quoi repose notre vision du monde. Il permet alors d’ouvrir des portes, d’imaginer de nouveaux possibles. Et donc de changer de trajectoire.
Si le fantastique est si puissant, c’est selon moi parce qu’il raconte mieux les réalités : celles d’un monde émotionnel, sensoriel, parfois irrationnel, en constante métamorphose. Vivant.
Ça vous parle ?